Article : Le droit d'accès aux archives publiques

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Les textes applicables

Les deux principales lois relatives à l’accès aux archives publiques actuellement en vigueur sont :

  • la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, dite « loi CADA », codifiée depuis 2016 dans le code des relations entre le public et l’administration ;
  • la loi n° 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives, codifiée dans le code du patrimoine.

Au-delà des grandes règles établies par ces deux textes, qui sont coordonnées pour former un cadre général cohérent applicable dans la plupart des cas, d’autres lois ont créé des dispositions particulières d’accès à certains types de documents ou d’informations : il faut donc toujours vérifier si un droit particulier s’applique. En effet, un certain nombre d’autres textes de loi prévoient des dispositions pour la communicabilité de documents produits dans le cadre des activités qu’ils réglementent. Par exemple, le code de l’environnement, le code électoral, le livre des procédures fiscales ou encore le code de la santé publique contiennent des dispositions particulières en matière d’accès aux documents et aux informations.

NB : Tous les documents administratifs sont des archives publiques ; en revanche, toutes les archives publiques ne sont pas des documents administratifs : par exemple, les registres d’état civil ou les minutes et répertoires de notaires ne sont pas des documents administratifs mais sont bien des archives publiques.

NB : Le droit d’accès exposé dans la présente fiche ne s’applique qu’aux archives publiques. Les documents d’archives privés suivent les règles déterminées par le propriétaire de ces documents.

La communicabilité

La protection des secrets prévus par la loi

Depuis la loi de 2008, les documents d’archives publiques sont par principe librement communicables à toute personne qui en fait la demande (art. L. 213-1 du code du patrimoine).

Cependant, ils contiennent parfois des informations qu’il est nécessaire de protéger pendant un certain temps avant de permettre leur communication. Les différents secrets protégés sont précisés à l’article L.311-5 du code des relations entre le public et l’administration, et les délais à l’issue desquels les documents qui les comportent deviennent librement communicables sont exposés à l’article L.213-2 du code du patrimoine. Les principaux secrets protégés sont les secrets de l’État (la défense nationale, les délibérations du gouvernement, la conduite de la politique extérieure, la sûreté de l’État…), les secrets des personnes (la vie privée, le secret médical…), le secret industriel et commercial, le secret de l’instruction judiciaire…

À l’échéance des délais de communicabilité, ces documents deviennent librement communicables sans restriction à toute personne qui en fait la demande.

Une seule catégorie de documents est incommunicable quelle que soit leur date : les archives publiques « dont la communication est susceptible d’entraîner la diffusion d’informations permettant de concevoir, fabriquer, utiliser ou localiser des armes nucléaires, biologiques, chimiques ou toutes autres armes ayant des effets directs ou indirects de destruction d'un niveau analogue ».

Avant l’expiration de des délais fixés à l’article L. 213-2 du code du patrimoine, un accès anticipé par dérogation est rendu possible par l’article L. 213-3 du même code, complété par l’article L. 311-8 du code des relations entre le public et l’administration.

Les principes de détermination du délai applicable

La communication des documents se détermine par type d’informations et non par typologie de documents, sauf exceptions (état civil, dossiers d’affaires portées devant des juridictions, minutes et répertoires d’officiers publics et ministériels...). Cela signifie qu’un document, et a fortiori un dossier, peut comporter des informations qui ne sont pas toutes soumises aux mêmes délais. Ce principe est issu des règles exposées dans le code des relations entre le public et l’administration, qui permettent la communication d’un document après occultation des informations non librement communicables.

Par exemple, une page de registre matricule militaire sera a priori communicable à l’issue d’un délai de 50 ans à compter de la date de la dernière information protégée par le secret de la vie privée portée sur cette page. Cependant, elle peut être soumise à un délai de 25 ans après le décès de la personne concernée ou 120 ans après sa naissance si sa date de décès n’est pas connue si des informations couvertes par le secret médical y sont inscrites. Il est donc souvent nécessaire de consulter le document avant de déterminer sa communicabilité.

Les modalités d’accès

Le choix des modalités d’accès

Le citoyen a le choix entre plusieurs modalités d’accès aux documents (art. L. 311-9 du code des relations entre le public et l’administration) :

  • la consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ;
  • la délivrance d'une copie sur un support identique, réalisée aux frais du demandeur, sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document ;
  • la courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique ;

Par ailleurs, l’administration a la possibilité, et parfois l’obligation, de diffuser en ligne ses informations afin d’en faciliter l’accès.

En revanche, elle n'est pas tenue de répondre aux demandes de communication imprécises (voir à ce sujet le billet du carnet « Droit(s) des archives »).

Les frais imposables au demandeur

Si l’accès sur place et l’envoi par voie électronique de documents déjà sous forme numérique se font gratuitement, en revanche certains frais peuvent être mis à la charge du demandeur lorsque le service se voit dans l’obligation de reproduire les documents afin de lui en envoyer une copie (art. R. 311-11 du code des relations entre le public et l’administration).

Les frais imposables au lecteur doivent respecter les prescriptions de l’arrêté du 1er octobre 2001 relatif aux conditions de fixation et de détermination du montant des frais de copie d'un document administratif, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent pas être supérieurs aux tarifs suivants :

  •  0,18 € par page de format A 4 en impression noir et blanc ;
  • 1,83 € pour une disquette ;
  • 2,75 € pour un cédérom.

Tout service supplémentaire peut être facturé : numérisation à la demande, reproductions de documents hors formats… Les tarifs alors applicables sont déterminés au cas par cas par chacun des services concernés, mais ne doivent pas excéder le coût du support fourni au demandeur, le coût d'amortissement et de fonctionnement du matériel utilisé pour la reproduction du document ainsi que le coût d'affranchissement selon les modalités d'envoi postal choisies par le demandeur (article R. 311-11 du code des relations entre le public et l’administration et décret n° 2001-493 du 6 juin 2001 pris pour l'application de l'article 4 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 et relatif aux modalités de communication des documents administratifs).

Des accès particuliers

Des accès privilégiés sont parfois possibles

L’accès peut dans certains cas dépendre de la qualité du demandeur : toute personne peut consulter les documents qui la concernent (art. L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration).

D’autres textes prévoient des accès privilégiés pour certaines personnes, sous la condition qu’elles prouvent leur qualité. Par exemple, le code de la santé publique prévoit un accès privilégié des ayants droits au dossier médical d’une personne décédée dans certaines circonstances (article L. 1110-4).

A contrario, des textes de loi peuvent également restreindre la notion de personne intéressée : par exemple, les attendus des jugements de divorce ne sont consultables que par le couple divorcé, et non par ses enfants, même lorsque ces derniers y sont mentionnés (article 248 du code civil et article 1082-1 du code de procédure civile).

Lorsque ces possibilités d’accès privilégié ne s’appliquent pas (personne qui ne peut en bénéficier, délais de cet accès expiré…), le cadre commun du droit des archives publiques s’applique : les documents sont librement communicables après expiration des délais et peuvent éventuellement être consultés par dérogation lorsque ces délais sont encore applicables.

Le droit d’accès particulier pour certains professionnels

Certains professionnels ont un droit d’accès privilégié aux documents d’archives publiques dans le cadre de leurs fonctions. Cet accès, prévu par des textes législatifs ou réglementaires, est le plus souvent restreint à des typologies particulières.

Par exemple, les notaires, en tant que mandataires des intéressés ou de leurs descendants ou ascendants, disposent d’un droit d’accès privilégié à certaines typologies de documents, considérés comme essentiels pour les recherches qu’ils effectuent dans le cadre de successions. Il s’agit des registres de l’état civil de moins de soixante-quinze ans, des documents fiscaux de moins de 50 ans, ainsi que des registres matricules du recensement militaire de moins de 120 ans.

De la même manière, les généalogistes professionnels, dans la mesure où ils disposent d’un mandat, peuvent disposer des mêmes facilités d’accès. Une autorisation de consultation de l’état civil de moins de soixante-quinze ans peut leur être délivrée par les Archives de France, après accord du tribunal de grande instance de Paris.

Ces autorisations, valables deux ans, doivent être présentées par les généalogistes avant toute consultation de ces documents.

Cet accès peut être au contraire extrêmement large pour certains professionnels. Les deux cas les plus fréquemment rencontrés par les services d’archives sont les suivants :

  • le juge d’instruction et l’officier de police judiciaire par lui commis ont un accès privilégié aux documents produits ou reçus par les administrations (article 99-3 du code de procédure pénale).
  • les services fiscaux disposent également d’un droit d’accès très larges aux actes conservés par les services publics d’archives (articles L. 92 du code de procédure fiscale).

La consultation avant l’expiration des délais : le principe de la dérogation

La consultation par dérogation, prévue à l’article L. 213-3 du code du patrimoine, permet à toute personne qui en fait la demande de consulter les documents protégés par des secrets avant l’expiration des délais fixés par la loi, après autorisation de l’administration des archives (c’est-à-dire du service interministériel des Archives de France pour l’ensemble des administrations, collectivités et services d’archives à l’exception des ministères des Affaires étrangères et du développement international et de la Défense qui gèrent leurs archives de manière autonome). Cette autorisation ne peut intervenir qu’après accord du service producteur des documents.

La réponse à une demande de dérogation doit intervenir dans les deux mois qui suivent le dépôt de la demande. Dans le cadre de cette procédure, l’absence de réponse vaut refus implicite.

En cas de refus de consultation, le demandeur peut alors saisir la Commission d’accès aux documents administratifs

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