Ce fut une année de débats sans fin avec 17.671 idées exprimées par des citoyens, 21.877 commentaires, des événements décentralisés. Un vaste exercice de démocratie participative avec, en conclusion, 49 recommandations détaillées pour réformer l'Union européenne, adapter ses politiques et rendre son organisation plus efficace.
Mais la guerre en Ukraine et les interrogations quant aux processus d'intégration de nouveaux Etats membres, qui concernent aussi la Géorgie, la Moldavie et certains pays des Balkans, ont dominé les discours des dirigeants des institutions européennes lors de la présentation, le 9 mai à Strasbourg, des conclusions de cette convention. Rappelant que l'Ukraine ne pourrait pas devenir membre de l'Union européenne avant "plusieurs années, en vérité sans doute plusieurs décennies", Emmanuel Macron, président en exercice du Conseil de l'Union européenne, a défendu l'idée d'une révision des traités et suggéré la création d'une inédite "Communauté politique européenne".
Réformer l'Europe pour intégrer l'Ukraine
"Si nous accordions déjà (à l'Ukraine) le statut de candidat à l'adhésion à notre Union européenne, nous savons tous parfaitement que le processus prendrait plusieurs années voire décennies. Sauf si nous décidions de réduire les standards", a lancé Emmanuel Macron.
Cette institution, qui serait parallèle à l'Union européenne et au Conseil de l'Europe (46 Etats membres, chargé de la promotion de la démocratie et de la défense des droits de l'homme), permettrait aux nations européennes de "trouver un nouvel espace de coopération politique, de sécurité, de coopération en matière énergétique, de transports et d'infrastructures, de circulation des personnes et en particulier de la jeunesse". L'adhésion à cette communauté "ne préjugerait pas de l'adhésion future à l'Union européenne" et elle ne serait "pas fermée à ceux qui ont quitté cette dernière", a précisé Emmanuel Macron. Une manière opportune de rouvrir la porte au Royaume-Uni, deux ans après le Brexit.
Confrontés à l'urgence de fournir une réponse à la guerre menée par la Russie en Ukraine, les dirigeants européens n'ont pas apporté d'éléments nouveaux quant aux aides financières et militaires en faveur de Kiev. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a indiqué avoir réceptionné ce jour même "5.000 pages de réflexions" transmises par le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans son processus d'adhésion. Voulant offrir "une image plus puissante que toute parade militaire qui se passe à Moscou, au moment où nous parlons", Ursula von der Leyen a profité de l'exercice pour vanter son bilan depuis deux ans à la présidence de la Commission. A la limite du hors sujet, elle a rappelé "la mise en place des règles dans le numérique" dans la législation européenne et promis une Union capable de "surmonter les plus grands défis", du changement climatique à la pandémie et à la sécurité dans nos régions. "Aucun de ces éléments n'avait été mis en place spécifique et dans les traités", a-t-elle insisté.
Une référence à Robert Schuman
Roberta Metsola, présidente du Parlement européen, a remercié avec insistance les participants à la Convention citoyenne (52.346 participants recensés sur la plateforme) et souligné une fois de plus l'impact de la guerre en Ukraine sur l'avenir du continent. "L'avenir de l'Europe n'a pas encore été écrit et notre avenir dépend de vous. Mais le 24 février, lorsque Poutine a ordonné à son armée d'envahir l'Ukraine, c'est un acte médiéval qui a totalement changé le monde", a-t-elle déclaré devant un hémicycle où avaient aussi été invités, à titre symbolique, dix réfugiés ukrainiens de 26 à 70 ans.
"La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent", a déclaré Emmanuel Macron. Cette citation reprise de Robert Schuman, le 9 mai 1950 au quai d'Orsay, a souvent été considérée comme le signal de départ de la construction européenne qui allait mener à la création de la CECA, suivie des Communautés européennes et de l'Union européenne. Emmanuel Macron souhaite s'en inspirer lorsqu'il ouvrira les négociations sur une révision des traités, promises dès le mois de juin au Conseil européen. "Je suis, je vous le dis, favorable à cette réforme institutionnelle", a-t-il prévenu. Ce message réformateur s'adresse aussi aux électeurs de Jean-Luc Mélenchon, qui prône pour réformer l'Europe de désobéir aux traités.