C’est un phénomène visible à l’œil nu : les cyclistes sont de plus en plus nombreux dans les rues parisiennes et les aménagements de plus en plus étriqués. A défaut d’être devenue la « capitale mondiale du vélo » promise par la maire de Paris, Anne Hidalgo, la fréquentation des pistes cyclables s’y est envolée, jusqu’à doubler entre 2022 et 2023 aux heures de pointe. Une tendance, enclenchée en 2019 lors des grèves de transports en commun puis en 2020 lors du déconfinement, qui ne se dément pas. On décomptait, pour le mois d’octobre 2023, deux fois plus de passages de vélos au niveau des capteurs installés par la ville qu’au mois d’octobre 2022.
Ce doublement, voire triplement de fréquentation à certains endroits, ne surprend pas le maire adjoint chargé de la mobilité et de l’espace public, David Belliard (Europe Ecologie-Les Verts, EELV) : « Nous savions déjà que l’usage du vélo avait largement dépassé le simple effet de mode. (…) Alors que la météo s’est dégradée à Paris depuis quelques semaines, nous avons encore enregistré des records de fréquentation. »
« Dans les mobilités plus qu’ailleurs, la question centrale c’est l’offre plutôt que la demande », estime l’élu, qui assure que la municipalité a « amplifié de manière massive l’offre en matière d’infrastructure » depuis sa réélection en 2020, en construisant des voies cyclables protégées et en installant des places de stationnement. C’est le principe du trafic induit : lorsqu’une infrastructure est créée ou améliorée, elle génère un volume de trafic supplémentaire, peu importe le mode de transport concerné (route, rail, vélo, marche, etc.).
Pourtant, entre le retard sur le « plan vélo » et celui pris sur la pérennisation des coronapistes, selon l’Observatoire du plan vélo mis en place par l’association Paris en selle, l’équipe municipale Parti socialiste-Parti communiste-EELV n’a réalisé que 21 % du projet, alors que la moitié de son deuxième mandat est écoulée. Un retard que M. Belliard reconnaît et impute en partie à la complexité des démarches en amont, « car nous n’avons pas la main sur tout l’espace public, il y a encore quelques difficultés avec la préfecture de police ».
Davantage de vélos que d’autos aux heures de pointe
Autre enseignement des statistiques de comptage routier ; aux heures de pointe, les vélos sont plus nombreux que les automobiles sur certains axes représentatifs de la capitale. Sur l’avenue de Flandre, le boulevard Voltaire et le boulevard Magenta, la moyenne ne dépasse jamais 384 véhicules motorisés à l’heure sur la partie centrale de la chaussée, contre 537 vélos sur les pistes cyclables en septembre et en octobre.
Les axes routiers sont saturés aux heures de pointe alors qu’une relative fluidité demeure sur les voies cyclables, notamment en raison de la faible occupation au sol de la bicyclette. Un vélo nécessite environ 1,5 mètre carré au sol pour transporter une personne, soit cinq fois moins qu’une voiture (7,5 mètres carrés pour le SUV le plus vendu, la Peugeot 2008) – à Paris et en Ile-de-France, on compte 1,1 personne en moyenne par véhicule.
Les derniers chiffres disponibles, datant de l’année 2021, indiquaient que le vélo représentait 5,6 % des déplacements dans Paris, contre 9 % pour la voiture. La politique de « rééquilibrage » menée par les majorités municipales de gauche depuis Bertrand Delanoë a réduit le trafic automobile intra-muros d’environ 45 % depuis 2001.