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L'intelligence artificielle s'immisce à l'école

L'intelligence artificielle s'invite à bas bruit dans l'Education nationale. En Ile-de-France, tous les lycées seront équipés d'une solution technologique pour améliorer la maîtrise du français par les élèves. La cité scolaire Paul-Valéry, à Paris, doit devenir le premier campus de l'intelligence artificielle de France.

Au FabLab du lycée Paul-Valéry, à Paris.
Au FabLab du lycée Paul-Valéry, à Paris. (Marie-Christine Corbier pour Les Echos)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 7 sept. 2021 à 11:30Mis à jour le 7 sept. 2021 à 11:38

C'est une nouveauté discrète de cette rentrée scolaire . C'est pourtant une petite révolution. L'intelligence artificielle fait ses premiers pas dans l'Education nationale, avec les lycées franciliens comme terrain de jeu. Une expérimentation avait été menée l'an dernier au lycée Paul-Valéry, dans le 12e arrondissement de Paris, avec des subventions de la région Ile-de-France. Elle va être généralisée à tous les lycées franciliens.

Les élèves ont ainsi accès, dès cette rentrée, à une solution technologique à base d'intelligence artificielle pour améliorer leur maîtrise du français. Baptisée Adaptiv'Langue et conçue par la start-up EvidenceB, elle propose 6.000 exercices pour travailler la syntaxe, la logique et l'orthographe. « On ne va pas éradiquer le décrochage scolaire, mais notre module permettra une meilleure maîtrise de la langue », assure Thierry de Vulpillières, son cofondateur.

« Des start-up, pas des Gafa »

« Les élèves ont accroché. C'est une immersion dans la langue française , à la manière d'une langue étrangère », se félicite Sylvie Rouanet-Dolisy, professeur de lettres classiques, tout en reconnaissant avoir « trop peu de recul » pour en mesurer le bénéfice. « L'élève le plus faible aura des phrases très simples et le plus fort des phrases de Proust, complète son collègue Ahmed El Nahtawy, enseignant de lettres modernes. Ce n'est pas un logiciel miracle où tout le monde s'éclate, mais une aide complémentaire. »

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« Une aide, et surtout pas un vecteur ou un commandeur », insiste-t-il. Le sujet est sensible : le lycée Paul-Valéry doit accueillir le premier campus de l'intelligence artificielle d'ici à 2025. Porté par la Région, la Ville de Paris et le rectorat, il doit accueillir des entreprises et des espaces de coworking, de formation à l'intelligence artificielle et de recherche. « Ce seront des start-up franciliennes, pas des Gafa », précise Françoise Sturbaut.

« Comme chez Xavier Niel »

La proviseure imagine déjà l'incubateur « comme chez Xavier Niel à la station F , même si c'est à une échelle moindre… » Elle plaide pour « mettre en réseau entreprises, étudiants, jeunes et laboratoires de recherche universitaire », parle volontiers de « porosité » entre son établissement et les entreprises et de son souhait de « donner envie aux jeunes d'aller vers les métiers du numérique ». Surtout les filles, « trop peu nombreuses ».

Le projet de campus est parfois perçu comme le moyen d'accéder enfin à la rénovation promise.

Le projet de campus est parfois perçu comme le moyen d'accéder enfin à la rénovation promise.Marie-Christine Corbier pour « Les Echos »

Le projet suscite des réticences, « très clairement », admet-elle. « Faire entrer start-up et coworking dans un lycée, c'est bouleverser totalement l'esprit du service public », confirme une enseignante. La perspective du campus est pourtant perçue comme le moyen d'accéder enfin à la rénovation promise de la longue barre typique du début des années 1960 . Ou, pour d'autres, comme un espoir de tirer le lycée vers le haut.

« La communauté éducative est divisée par l'arrivée des entreprises dans l'établissement, confie Ketty Valcke, professeure d'histoire-géographie et militante au SNES-FSU. On reçoit des élèves très fragiles, certains enseignants imaginent que ce campus pourrait changer l'image de l'établissement, d'autres ont de vraies craintes sur les partenariats avec des entreprises du secteur privé. » L'accueil de chercheurs sur le site, jugé rassurant, tend à apaiser les esprits.

« L'Education nationale ne peut pas vivre en circuit fermé, elle est là pour ouvrir les élèves au monde tel qu'il est, soutient Françoise Sturbaut. On va travailler sur l'intelligence artificielle en montrant ses limites et ses dangers. »

« Prudence »

En attendant le futur campus, collégiens, lycéens et élèves de classe préparatoire continuent d'affluer, nombreux, au FabLab que Stéphane Pamphile, enseignant de physique-chimie et d'informatique, a cofondé fin 2017 avec son collègue Thibaut Plisson. Au troisième étage de la cité scolaire, il accueille les robots et les jeux fabriqués par les élèves. Des ateliers dédiés à l'intelligence artificielle ont commencé à voir le jour. En cette rentrée, l'objectif est d'aller au-delà, pour en « démystifier le côté magique », indique-t-il. Avec la perspective du campus, Françoise Sturbaut espère aussi que les enseignants, dont la présence au FabLab à raison de douze heures par semaine relève quasiment du bénévolat, seront rémunérés pour leur investissement.

« L'Education nationale ne peut pas vivre en circuit fermé », soutient la proviseure du lycée Paul-Valéry, Françoise Sturbaut.

« L'Education nationale ne peut pas vivre en circuit fermé », soutient la proviseure du lycée Paul-Valéry, Françoise Sturbaut.Marie-Christine Corbier pour Les Echos

Dans l'entourage du ministre de l'Education nationale, on regarde l'idée du campus « avec intérêt ». « Si ça fonctionne, on essaiera de la généraliser », glisse-t-on dans son entourage. Mais, pour l'instant, « c'est complètement exploratoire », et le ministère se montre « très prudent dans les relations entreprise-école ». « C'est bien qu'il y ait une ouverture et que les deux mondes se connaissent, confie un proche de Jean-Michel Blanquer, mais il ne faut pas forcer les mélanges. L'institution et le corps enseignant sont très prudents par rapport à cela, à juste titre. »

L'intelligence artificielle pour apprendre l'anglais

En décembre prochain, le ministère de l'Education nationale va généraliser Captain Kelly, une solution d'apprentissage de l'anglais en primaire qui aide les élèves dans la reconnaissance de mots et l'accentuation. Cette solution technologique est issue des partenariats soutenus par le ministère. C'est un assistant qui s'utilise sans connexion Internet, destiné aux professeurs des écoles du CP au CM2. « Plus de 300 activités courtes, variées et ludiques permettent aux élèves d'écouter, prononcer et comprendre avec plaisir et exigence », assure le ministère.

Marie-Christine Corbier

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